Redécoupage des circonscriptions fédérales de 2022

Commentaire 23 (8 septembre 2022) commentaires et rétroaction

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Sans nom

Mémoire du Bloc québécois

Sommaire

Le Bloc Québécois prend le parti de la protection des régions du Québec et de leur caractère unique, au cœur de l'identité québécoise. Il porte le principe de « représentativité effective », en vertu duquel il est impératif de « tenir compte d'autres facteurs que la parité électorale, tels la géographie et les intérêts de la collectivité, dans la délimitation des circonscriptions électorales 1  »

Le Bloc Québécois s'oppose catégoriquement à l'élimination de la circonscription d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia et à l'affaiblissement de la représentation du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie que ce choix représente.

Notre formation politique fera valoir que cette perte de circonscription contribuera à estomper le rayonnement de l'Est-du-Québec plutôt qu'à le soutenir. Nous aborderons l'importance capitale du rôle joué par un député ou une députée dans une région plus éloignée où les défis, les spécificités méconnues et les besoins uniques sont aussi vastes que le territoire à couvrir. Nous traiterons de la rupture de communautés d'intérêts clairement définies ainsi que de l'écosystème régional qui s'est historiquement développé au sein d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia. Nous démontrerons également que l'élimination de la circonscription entraînera une diminution de l'offre de services de proximité et de qualité offerte aux citoyens, aux élus locaux, aux milieux d'affaires et aux organismes communautaires.

Le Bloc Québécois se fera également le messager d'une très forte mobilisation régionale contre la disparition de la circonscription. Il importe de se battre pour la voix des régions du Québec et c'est le choix que font aujourd'hui la vaste majorité des élus, issus de toutes les formations politiques, sur tout le territoire à l'est de Montmagny. La proposition de redécoupage de la carte électorale fédérale contribue à affaiblir le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie, à un moment charnière pour leur avenir alors que des développements très récents permettent d'espérer un frein à leur déclin démographique.

Le Bloc Québécois travaillera aussi localement avec les préfets, les élus municipaux et les citoyens afin de réduire au maximum le morcellement de municipalités régionales de comté (MRC), entre plusieurs circonscriptions électorales fédérales ainsi que l'inclusion de municipalités dans des ensembles où elles n'ont aucune appartenance réelle.

Nous sommes persuadés que la Commission saura s'inspirer des nombreux témoignages des citoyens et des élus directement ancrés dans leur milieu qui viendront lui présenter les particularités de la région où ils vivent.

Nous sommes persuadés que la Commission constatera l'ampleur du mouvement en faveur du maintien d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia et qu'elle corrigera le tir, au nom de la démocratie.

Protégeons la voix unique de l'Est-du-Québec

Le Bloc Québécois remercie d'entrée de jeu la Commission pour son important travail décennal de mise à jour de la carte électorale fédérale en vue de toute élection fédérale survenant à partir de 2024. Ce travail neutre et rigoureux est nécessaire à la santé de la démocratie dans son ensemble.

Toutefois, notre formation politique refuse la disparition de la circonscription d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia et l'affaiblissement de la voix de l'Est-du-Québec et des populations qui y résident.

Effet de la proposition de refonte

La proposition soumise par la Commission a pour effet d'abolir la circonscription d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia, diminuant de cinq à quatre le nombre de circonscriptions dans l'Est-du-Québec et de quatre à trois le nombre de circonscriptions entre Montmagny et les Îles-de-la-Madeleine, ainsi que le nombre de députés régionaux avec les bureaux de comté, les services de proximité et la tribune qu'ils représentent.

Les diverses populations situées entre Montmagny et les Îles-de-la-Madeleine seraient donc redistribuées entre trois nouvelles circonscriptions.

Gaspésie–Les Îles-de-la-Madeleine–Listuguj

À l'est, la nouvelle circonscription prendrait le nom de Gaspésie–Les Îles-de-la-Madeleine–Listuguj et inclurait à l'ancienne composition toutes les municipalités situées à l'est de la route 132 et de la 195, excluant Matane. Gesgapegiag et Listuguj seraient également transférées à cette nouvelle circonscription élargie. La population qui y réside passerait ainsi de 75 927 personnes à 104 682, intégrant ainsi également plus de la moitié des 14 461 km2 à couvrir du comté éliminé.

« Comprend :

  1. les municipalités régionales de comté de Bonaventure, La Côte-de-Gaspé, La Haute-Gaspésie et Le Rocher-Percé;
  2. les parties des municipalités régionales de comté de La Matanie, de La Matapédia et d'Avignon, constituées des villes de Amqui, de Causapscal et de Carleton-sur-Mer; des municipalités de Escuminac, Grosses-Roches, Lac-au-Saumon, Maria, Matapédia, Les Méchins, Nouvelle, Pointe-à-la-Croix, Saint-Alexis-de-Matapédia, Saint-André-de-Restigouche, Saint-René-de-Matane, Saint-Vianney, Sainte-Félicité, Sainte-Florence, Saint-François-d'Assise et Sainte-Marguerite-Marie; des municipalités de paroisse de Saint-Adelme, Saint-Alexandre-des-Lacs, Saint-Jean-de-Cherbourg et Saint-Tharcisius; des territoires non organisés de Lac-Casault, Ruisseau-des-Mineurs, Rivière-Bonjour, Rivière-Nouvelle et Routhierville; de la municipalité de canton de Ristigouche-Partie-Sud-Est; des réserves indiennes de Listuguj et de Gesgapegiag;
  3. le territoire équivalent des Îles-de-la-Madeleine constitué des municipalités de Grosse-Île et des Îles-de-la-Madeleine. 2  »

Rimouski–Matane

Au centre, la circonscription de Rimouski–Neigette–Témiscouata–Les Basques prendrait de l'expansion vers l'est en intégrant le territoire couvert jusqu'à la route 195, incluant Matane, ainsi que toutes les municipalités situées à l'ouest de la 132, donc la rive gauche de la vallée de la Matapédia. En contrepartie, vers l'ouest, le Témiscouata change de circonscription.

« Comprend :

  1. les municipalités régionales de comté des Basques, de La Mitis et de Rimouski-Neigette;
  2. les parties des municipalités régionales de comté de La Matanie, de La Matapédia et d'Avignon constituée de la ville de Matane; des municipalités d'Albertville, Baie-des-Sables, L'Ascension-de-Patapédia, Sainte-Paule, Saint-Ulric, Sayabec et Val-Brillant; des municipalités de paroisse de Saint-Cléophas, Saint-Damase, Saint-Léandre, Saint-Léon-le-Grand, Saint-Moïse, Saint-Zénon-du-Lac-Humqui et Sainte-Irène; du village de Saint-Noël; des territoires non organisés de Lac-Alfred, Lac-Matapédia, Rivière-Patapédia-Est, Rivière-Vaseuse et Ruisseau Ferguson. 3  »

Montmagny–Témiscouata–Kataskomiq

À l'Ouest, la circonscription anciennement connue sous le nom de Montmagny–L'Islet–Kamouraska–Rivière-du-Loup change de nom, notamment pour témoigner de la nouvelle inclusion de la MRC du Témiscouata rendue nécessaire par le rebrassage démographique à la suite de l'abolition d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia.

« Comprend les municipalités régionales de comté de Kamouraska, L'Islet, Montmagny, Rivière-du-Loup et Témiscouata, incluant la réserve indienne de Kataskomiq. 4  »

Des conséquences inacceptables

Le mandat de la Commission lui est clairement imparti par la Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales. Son rapport cite d'ailleurs l'article 15 de la Loi, qui explique la marge de manœuvre qu'a la Commission entre deux principes fondamentaux.

« 15 (1) Pour leur rapport, les commissions suivent les principes suivants :

  1. le partage de la province en circonscriptions électorales se fait de telle manière que le chiffre de la population de chacune des circonscriptions corresponde dans la mesure du possible au quotient résultant de la division du chiffre de la population de la province que donne le recensement par le nombre de sièges de député à pourvoir pour cette dernière d'après le calcul visé au paragraphe 14(1);
  2. sont à prendre en considération les éléments suivants dans la détermination de limites satisfaisantes pour les circonscriptions électorales :
    1. la communauté d'intérêts ou la spécificité d'une circonscription électorale d'une province ou son évolution historique,
    2. le souci de faire en sorte que la superficie des circonscriptions dans les régions peu peuplées, rurales ou septentrionales de la province ne soit pas trop vaste. 5  »

La Commission a donc le mandat d'arriver à une carte électorale de 78 circonscriptions au Québec, dont le quotient électoral est fixé à 108 998 personnes par circonscription. Elle a droit à une marge de manœuvre de plus ou moins 25 % d'écart de ce quotient électoral. Les commissions peuvent toutefois aussi, « dans des circonstances qu'elles considèrent extraordinaires », excéder cette marge de manœuvre 6 .

De l'avis respectueux du Bloc Québécois et d'un nombre important d'acteurs locaux, la Commission ne s'est pas suffisamment attardée à la partie « b) » de cet énoncé de principes dans l'élimination d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia. Le retrait de cette circonscription et la redistribution de la région entre les trois comtés restants rompt des communautés d'intérêts, ne tient pas compte des spécificités du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie ni de leur évolution historique, en plus de considérablement augmenter la difficulté d'offrir des services de proximité dans l'immense circonscription que devient Gaspésie–Les Îles-de-la-Madeleine–Listuguj.

Le Bloc Québécois souligne que la Commission elle-même a soulevé l'importance de ces éléments. Elle s'est inspirée dans son mémoire de deux renvois de la Cour suprême qui en réitèrent l'importance à des fins de « représentation effective » : Renvoi : Circ. Électorales provinciales (Sask.), (1991) 2 R.C.S. 158, que nous qualifierons par la suite « d'arrêt Carter », puis Toronto (Cité) c. Ontario (Procureur général) 2021 CSC 34.

La Commission explique que « la parité du pouvoir électoral n'est pas le seul facteur à prendre en compte pour que différents intérêts, groupes et communautés puissent être équitablement représentés à la Chambre des communes. D'autres facteurs, dont ceux mentionnés dans l'article 15 de la Loi et les arrêts de la Cour suprême (les caractéristiques géographiques d'une circonscription, ses limites historiques, les intérêts d'une collectivité donnée ou son histoire, la représentation des groupes minoritaires) peuvent justifier la Commission de déroger à la règle de « une personne, un vote » dans l'intérêt, pour reprendre les mots de la Cour suprême, d'une représentation effective de « la diversité de notre mosaïque sociale ». 7  »

Le Bloc Québécois est pourtant d'avis que la Commission ne s'est pas attardée à la représentation effective avant d'éliminer Avignon—La Mitis—Matane—Matapédia sur des bases purement démographiques et n'a pas suffisamment tenu compte des éléments susmentionnés dans le rebrassage de la région en trois circonscriptions. Nous en soulèverons plusieurs exemples.

Le Bloc Québécois se questionne également à savoir pourquoi la Commission ne s'est pas saisie du pouvoir discrétionnaire que lui confère la Loi pour maintenir la circonscription. La Commission n'a justifié son choix que par les données démographiques des années passées. Or, la Loi est limpide à l'effet que la Commission doit aussi tenir compte de « la communauté d'intérêts ou la spécificité d'une circonscription électorale d'une province ou son évolution historique ».

Bien que la Commission n'ait pas l'obligation légale de le faire, elle a, selon le Bloc Québécois, le devoir de justifier sa décision avant d'affaiblir la voix de l'Est-du-Québec en lui retirant un comté. Elle a le devoir de présenter les études, les consultations, les données et les témoignages qui lui permettent de déterminer qu'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia ne constitue pas une « communauté d'intérêts » ou n'a pas d'« évolution historique » en commun. Elle ne présente aucun argument permettant de conclure qu'éliminer cette circonscription permettra une meilleure représentation effective de « la diversité de notre mosaïque sociale ».

Nous avons remarqué que la proposition de redécoupage pour Terre-Neuve-et-Labrador explique mieux son choix de maintenir une circonscription s'éloignant de beaucoup du seuil de 25 %. Elle y détaille ce qu'elle estime être des communautés naturelles méritant que leur représentation soit protégée.

Le Bloc Québécois réfère également à la volonté dans cet autre rapport, de ne pas inutilement chambouler l'ordre historiquement établi : « Même si la Commission voulait reconsidérer cette question, vu que le Labrador est une circonscription distincte depuis environ 35 ans, il faudrait des raisons impérieuses pour changer le statu quo 8  ». Nous ne constatons qu'aucune « raison impérieuse » n'est invoquée au Québec pour rompre la région d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia et ses MRC.

Les homologues terre-neuviens de la Commission québécoise poursuivent : « Le maintien des limites actuelles a une incidence sur le niveau de représentation d'autres circonscriptions dans la province. Cependant, cette incidence n'est pas si importante qu'elle constituerait une raison impérieuse de modifier les limites actuelles 9  ». Là aussi, le Bloc Québécois constate que la Commission n'explique pas en quoi l'existence d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia a une incidence assez importante sur les autres circonscriptions du Québec au point de constituer une « raison impérieuse » de l'éliminer.

En somme, le Bloc Québécois redoute que la Commission ne se soit pas basée sur les réalités témoignées par la population locale ni sur l'avis d'experts avant de trancher qu'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia ne constituait pas une communauté naturelle méritant d'être maintenue et protégée. La Commission n'en fait aucunement la démonstration et le Bloc Québécois ne connaît aucun avis en ce sens. Une décision aussi importante qu'éliminer une circonscription ne devrait en aucun cas être prise sans justification.

L'importance de protéger la représentation des régions

La Commission s'est retrouvée à devoir jouer avec le même casse-tête que toutes celles qui l'ont précédée : concilier les concepts de représentation effective et du « une personne, un vote » dans un Québec et un Canada composant à la fois avec des territoires immenses et de fortes concentrations de population dans des endroits restreints.

80,2 % du territoire québécois est situé en « régions ressources », mais seulement 6,7 % des Québécois et des Québécoises y vivent 10 .

Or, ces Québécois et ces Québécoises sont sans nul doute ceux parmi nous qui ont le plus grand besoin d'une représentation adéquate à la fois pour légiférer selon leurs intérêts, mais aussi pour faire connaître les enjeux spécifiques qui les touchent.

La députée ou le député d'une circonscription métropolitaine aura la tâche de représenter au fédéral essentiellement les citoyens d'un quartier ou deux de sa ville.

La députée ou le député d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia représente au fédéral, en plus des citoyens, quatre MRC, 56 municipalités et deux communautés autochtones vivant sur près de 15 000 km2.

Un élu de région, comme dans Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia, devra porter les enjeux vécus dans des secteurs aussi divers que l'agriculture, la foresterie, la pêche, le tourisme rural et plus encore.

Sans représentation forte à la Chambre des communes des régions, l'ensemble des décisions législatives sur des sujets aussi divers que la gestion des ressources halieutiques, l'exploitation des ressources naturelles, l'accès à la téléphonie cellulaire ou les coupes en forêt, par exemple, sont prises par des élus de milieu urbain chez qui elles ont peu ou pas d'implications concrètes.

Affaiblir la voix des régions plus éloignées a non seulement un impact sur la représentation des citoyens et municipalités, mais carrément sur le type d'enjeux dont l'existence même est soulevée à Ottawa. Sans représentation efficace, encore en 2022, les préoccupations d'un entrepreneur individuel dans les pêcheries à Matane peinent à franchir les 800 km et plus qui le séparent de la rue Wellington. Avec une réduction du nombre de députés en région, sans lobby ni centrale syndicale, ce qu'une personne hypothétique comme celle-là veut exprimer au gouvernement du Canada risque de ne pas animer les débats sur la colline parlementaire.

Le concept de poids politique n'est pas strictement démographique. La perte d'une circonscription régionale implique presque automatiquement que les enjeux de cette région seront moins publicisés, connus et représentés. Les citoyens y voient leur poids politique s'affaiblir tant mathématiquement que dans leur capacité concrète à se faire entendre.

Forte mobilisation régionale contre le redécoupage

La proposition de faire disparaître Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia soulève l'opposition de tous les acteurs régionaux.

Plus de trente d'entre eux ont fait connaître leur mécontentement dans le cadre d'une lettre ouverte rédigée par Kristina Michaud, députée d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia qui fut publiée le 12 août dernier 11 , dans laquelle ils écrivent : « nous nous mobiliserons et ferons front commun pour que cette proposition soit retirée et que la circonscription d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia reste telle quelle ».

Parmi les signataires, à part Mme Michaud, notons Maxime Blanchette-Joncas, député bloquiste de Rimouski–Neigette–Témiscouata–Les Basques, et Bernard Généreux, député conservateur de Montmagny–L'Islet–Kamouraska–Rivière-du-Loup.

Diane Lebouthillier, ministre libérale et députée de Gaspésie–Les-Îles-de-la-Madeleine, s'était de son côté aussi prononcée résolument contre la proposition de redécoupage, notamment le 2 août dernier : « Pour moi, la refonte du découpage électoral qui mène à l'abolition d'une circonscription dans l'Est-du-Québec n'est rien de moins qu'une aberration, et ce, à plusieurs titres. Premièrement, la perte d'un comté, donc la perte d'une voix politique régionale. Deuxièmement, la perte de démocratie pour les gens de l'Est-du-Québec et troisièmement, la nouvelle circonscription sera grande comme la Belgique et dans le calcul qu'on a fait à mon bureau, 62 fois la superficie de l'île de Montréal 12  ».

C'est donc dire que tous les députés issus des trois partis politiques fédéraux élus entre Montmagny et les Îles-de-la-Madeleine s'opposent catégoriquement à la disparition d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia.

Ils partagent l'avis de six des sept députés de circonscriptions touchées par la refonte (au moment de la dissolution de l'Assemblée nationale en vue du scrutin du 3 octobre prochain) : Marie-Eve Proulx, députée de Côte-du-Sud ; Harold LeBel, député de Rimouski ; Pascal Bérubé, député de Matane-Matapédia ; Méganne Perry Mélançon, députée de Gaspé ; Sylvain Roy, député de Bonaventure ; et Joël Arseneau, député des Îles-de-la-Madeleine. Tous ont signé la lettre de Mme Michaud et approuvent la démarche visant à maintenir telle quelle Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia.

Le mouvement d'opposition inclut aussi officiellement huit préfets de MRC, douze maires et mairesses ainsi qu'une dizaine d'anciens élus municipaux, québécois et fédéraux.

La Commission doit prendre acte du fait que de Montmagny jusqu'aux Îles-de-la-Madeleine, sa proposition rencontre une vive et quasi unanime opposition.

Rompre des communautés d'intérêts

Le Bloc Québécois estime qu'une attention insuffisante a été portée à la rupture de communautés d'intérêts dans l'élimination d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia, puis sa redistribution entre les comtés voisins. De nombreuses cassures évidentes peuvent être observées.

Par exemple, il va de soi qu'il n'est pas naturel que Matane se retrouve dans une circonscription (Rimouski–Matane), mais la Matanie dans une autre (Gaspésie–Les Îles-de-la-Madeleine–Listuguj). Le nom lui-même révèle tout ce qu'il y a à savoir sur la relation historique entre les municipalités et citoyens de la région.

Sainte-Flavie, qui se définit elle-même officiellement en tant que « porte d'entrée de la Gaspésie 13  », se fait redéfinir par la proposition de nouvelle carte électorale en tant que municipalité du Bas-Saint-Laurent.

La vallée de la Matapédia est séparée en deux alors qu'il s'agit d'une même rivière et d'une même région distincte sur ses rives, de telle sorte que le chef-lieu régional d'Amqui est séparé du village voisin de Val-Brillant avec lequel il vit pourtant en symbiose. La Matapédia se comporte comme son propre écosystème régional en tant que région enclavée plutôt que côtière, forestière plutôt qu'halieutique. Même son tourisme, davantage axé sur la chasse, la pêche et les sports, distingue la Matapédia de la région touristique de la Gaspésie.

La Cour suprême, dans l'arrêt Carter de 1991, reprenait l'expression du juge américain Felix Frankfurter pour décrire l'ensemble de ces considérations dont la carte électorale doit tenir compte : « la réalité pratique de la vie 14  ».

Les différentes communautés d'intérêts formant la circonscription existent au palier municipal au sein des MRC. Elles sont déjà le lieu de rassemblement des municipalités ayant des intérêts en commun dans l'ensemble des régions du Québec et jouent d'ailleurs un rôle prépondérant, notamment dans l'Est-du-Québec.

Elles existent également au palier québécois. Québec s'est aussi penché sur la situation du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie, comme le fait actuellement la Commission. En 2011, la Commission de la représentation électorale du Québec avait recommandé un statut particulier pour la circonscription québécoise de Gaspé, même si le nombre d'électeurs ne le justifiait plus. Elle avait considéré exactement la même division que propose aujourd'hui la commission fédérale, avant de constater que ce n'était pas souhaitable :

« En effet, le contexte géographique particulier de la circonscription de Gaspé, qui se situe à l'extrémité est de la péninsule, fait en sorte que la seule façon d'y ajouter des électeurs consiste à l'agrandir vers l'ouest. Il faudrait alors déplacer la limite de la circonscription de Gaspé jusqu'à la Ville de Matane. Les distances à parcourir pour cette circonscription seraient ainsi très importantes et la délimitation ferait en sorte de scinder les territoires habités aux abords de Matane. De plus, au cours des auditions publiques, plusieurs intervenants ont fait valoir que la région administrative de la Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine représente bien les communautés naturelles en place, notamment pour la portion nord de la péninsule gaspésienne. Il s'agit visiblement d'une limite déterminante pour ce territoire de même que pour la population et les élus, qui y ont fait référence à plusieurs reprises. La délimitation choisie entre les circonscriptions de Gaspé et de Matane-Matapédia est donc plus respectueuse des communautés naturelles et des limites des régions administratives et des MRC. 15  »

Bref, ces communautés naturelles sont reconnues au municipal et à Québec, pour ensuite disparaître dans la proposition de carte électorale au palier fédéral.

Selon le Bloc Québécois, le maintien d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia demeure le seul moyen de respecter les communautés d'intérêts et l'historique de la région dans le cadre d'une circonscription de grande taille sans être démesurément trop vaste.

Protéger la représentation des régions : des précédents

L'enjeu de la représentation électorale des régions éloignées, comme Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia, ne date pas d'hier.

Le Québec a modifié sa Loi électorale afin d'y inclure, à l'article 17, la définition de la circonscription des Îles-de-la-Madeleine même si celle-ci ne répond pas au quotient obtenu par la division du nombre total d'électeurs par le nombre de circonscriptions 16 . En effet, Québec a estimé que la réalité de cette région isolée en pleine mer entre le Québec et les provinces de l'Atlantique méritait le maintien coûte que coûte de son poids politique. Ottawa n'a pas fait ce choix, incluant déjà les Îles au sein du vaste comté de Gaspésie–Les Îles-de-la-Madeleine.

Le Québec a également choisi de protéger les limites de sa circonscription de Gaspé, comme précédemment discuté dans ce document, afin de conserver ensemble les différentes communautés naturelles de la région et éviter des choix déchirants comme séparer Matane de la Matanie. 17 Ce choix de respecter les communautés naturelles de l'Est-du-Québec est toujours en vigueur pour l'élection 2022 en cours.

Il est également difficile de ne pas constater que la clause sénatoriale, si elle ne le fait pas nommément, a pour unique effet de protéger le poids politique de l'Île-du-Prince-Édouard à quatre députés.

La Commission elle-même choisit actuellement de protéger des circonscriptions à Terre-Neuve-et-Labrador ainsi qu'en Ontario.

La Commission n'a ni le mandat ni le pouvoir de modifier les lois afin de protéger Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia. Ce n'est pas ce que le Bloc Québécois lui demande. Mais la Commission peut toutefois recommander le statu quo pour la carte électorale de l'Est-du-Québec et c'est ce que le Bloc Québécois et la région réclament.

Perdre bien plus qu'une circonscription

Retirer à l'Est-du-Québec une circonscription entraîne des conséquences allant bien au-delà de la carte électorale.

Les citoyens d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia sont actuellement servis par quatre bureaux situés à Amqui, Carleton, Price et Matane. Ces bureaux offrent tout un éventail de services allant du soutien dans les dossiers d'assurance-emploi aux complications liées à l'immigration ou encore, dans le traitement de cas particuliers glissant entre les mailles du filet fédéral. Ces bureaux ont d'ailleurs vu leur rôle se transformer depuis la pandémie, devant les véritables centres de services locaux alors que Service Canada fermait ses bureaux, que Revenu Canada et l'assurance-emploi cumulaient les difficultés, puis avec la récente crise fortement médiatisée des passeports, par exemple.

En matière de services aux citoyens, depuis sa première élection en 2019, l'actuelle députée d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia, Kristina Michaud, et son équipe ont pris en charge :

  • 493 dossiers d'assurance-emploi;
  • 89 dossiers de problèmes avec l'Agence du revenu du Canada;
  • 75 dossiers liés à la Pension de sécurité de la vieillesse et au Supplément de revenu garanti des aînés;
  • 244 dossiers de problèmes avec les programmes de soutien durant la pandémie;
  • 118 dossiers d'immigration;
  • 16 demandes de soutien pour l'obtention d'un passeport;
  • 36 requêtes d'assistance avec l'Allocation canadienne pour enfants;
  • 8 cas de fonctionnaires aux prises avec les déboires du système de paie Phénix;
  • 5 dossiers relatifs au casier judiciaire;
  • 4 rapatriements de citoyens coincés à l'étranger lors de la fermeture des frontières en début de pandémie.

L'équipe d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia a traité au total 1088 demandes de services durant ces 34 mois, soit près de 400 par année.

Les bureaux de députés sont également les intervenants privilégiés des élus locaux et des organismes communautaires.

L'équipe d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia a traité :

  • 34 demandes d'intervention de la part de municipalités;
  • 65 demandes d'interventions de la part d'organismes et d'entreprises.

Ce sont les chiffres correspondant au nombre de personnes et identités soutenues, et non pas à l'action posée, certains dossiers complexes requérant évidemment plus d'énergie que d'autres.

L'élimination d'une circonscription correspond à faire perdre à la région une capacité de service financée par la Chambre des communes à hauteur d'une somme standard de 388 000 $ annuellement, à laquelle s'ajoute un supplément géographique de 22 060 $ pour tenir compte de la grandeur de la circonscription d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia.

Circonscription Budget de base $ Supplément par électeur $ Supplément géographique $ Supplément Annexe 3 $ Total du BBD $ Compte de frais divers (3 % de BBD) Compte de frais de publicité (10% du BBD) $
Avignon – La Mitis – Matane – Matapédia  388 000 - 22 060 - 410 060 12 302 41 006
Gaspésie – Les Îles-de-la-Madeleine 388 000 - 25 200 - 413 200 12 396 41 320

Extraits du Manuel des allocations et services aux députés, Chambre des communes

Ce supplément est calculé selon la grille suivante :

Supplément géographique annuel pour 2022-2023
Superficie (km2) Supplément ($)
500 001 ou plus 69 310
200 001 – 500 000 48 840
75 001 – 200 000 39 400
20 001 – 75 000 28 350
15 001 – 20 000 25 200
8 001 – 15 000 22 060
3 001 – 8 000 11 020
500 – 3 000 6 300

Extrait du Manuel des allocations et services aux députés, Chambre des communes

La circonscription de Gaspésie–Les Îles-de-la-Madeleine reçoit le même montant de base assorti d'un supplément géographique de 25 200 $.

Avaler une partie d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia ferait passer le comté de Gaspésie au niveau suivant, pour une superficie entre 20 001 et 75 000 km : 28 350 $. La bonification maximale du supplément géographique offert à la prochaine ou au prochain député de la circonscription proposée de Gaspésie–Les Îles-de-la-Madeleine–Listuguj correspondrait à 6 290 $ de plus pour tenir compte de l'ensemble du territoire à couvrir.

En englobant 28 755 personnes du comté d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia, le nouveau comté gaspésien pourra dorénavant toucher un supplément par électeur.

Supplément géographique annuel pour 2022-2023
Nombre d'électeurs Supplément ($)
150 001 ou plus 68 330
130 001 – 150 000 56 920
110 001 – 130 000 45 570
90 001 – 110 000 34 190
80 001 – 90 000 22 810
70 000 – 80 000 11 400

Extrait du Manuel des allocations et services aux députés, Chambre des communes

En se fiant aux données d'Élections Canada pour le scrutin fédéral de 2021, on constate que 83 % de la population d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia est inscrite en tant qu'électeur (59 696 sur 71 897). Si la tendance se maintient, on peut donc présumer que la nouvelle circonscription gaspésienne recueillerait grosso modo 23 875 électeurs supplémentaires par rapport aux 65 567 qu'elle a actuellement. Le total de 89 442 électeurs permettrait ainsi à la nouvelle circonscription gaspésienne de toucher le Supplément par électeur annuel à hauteur de 22 810 $.

C'est donc dire que l'hypothétique comté de Gaspésie–Les Îles-de-la-Madeleine–Listuguj devra, avec 29 100 $ de plus en budget, couvrir l'équivalent en services pour la région d'un(e) député(e), de quatre bureaux de circonscription avec personnel qualifié, associé à 410 060 $ de financement actuel. Même en tenant compte du fait qu'une partie de la tâche incombe à la circonscription voisine éventuelle de Rimouski–Matane, on ne peut que constater qu'il y a un gouffre budgétaire majeur.

Les bureaux de circonscription de députés fédéraux reçoivent également des allocations leur permettant de commanditer, par la publicité, divers événements, médias locaux, organismes et autres. Certains programmes fédéraux majeurs sont aussi directement rattachés aux députés de circonscriptions : les emplois d'été pour les jeunes et le soutien aux projets des aînés. Pour la circonscription d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia, ces sommes représentent, depuis 2019 :

  • 132 394 $ en publicités, partenariats et promotion
  • 1 527 069 $ via le programme Nouveaux Horizons pour les aînés
  • 3 289 349 $ via le programme Emplois d'été Canada

Ce sont dont cinq millions de dollars sur trois ans (4 948 812 $) qui sont mis en jeu pour les citoyens et citoyennes avec la disparition de leur circonscription. Ces programmes sont liés à l'existence de la circonscription. Une redistribution aurait lieu dans les comtés voisins, certes, mais il est tout à fait justifié de s'inquiéter qu'elle se fasse à perte pour la région.

D'aucune façon la future ou le futur député de Gaspésie–Les Îles-de-la-Madeleine–Listiguj n'arrivera financièrement à offrir une qualité de services dans la région équivalant au maintien d'une députée ou un député et de quatre bureaux de comté avec un plein budget et du personnel qualifié.

Tendance à la baisse freinée ?

La Commission doit dès maintenant déterminer si elle coupe une circonscription dans la région et ne réévaluera son choix que dix ans plus tard. Dans la réalité, le Bloc Québécois prétend qu'il s'agit d'une décision permanente et que toute future commission ne reviendra pas en arrière.

La Commission se base sur le déclin démographique du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie, une tendance indéniable depuis 1986-1987.

Or, le Québec régional est en train de changer sous nos yeux.

L'Institut de la statistique du Québec publiait, en janvier dernier, ses fiches démographiques des régions du Québec pour l'année 2021 18 . Ses constats sont frappants : pour la première fois de l'histoire récente, le bilan migratoire des régions du Bas-Saint-Laurent et de la Gaspésie est en hausse ! Le Bas-Saint-Laurent voit sa population croître depuis 2018-2019, mais atteint un taux d'accroissement nettement plus élevé de 5,2 pour 1000 pour l'année 2020-2021, par rapport à 3,0 pour l'ensemble du Québec.

Solde migratoire interrégional, Bas-Saint-Laurent, 2010-2011 à 2020-2021
Description de l'image fournie par Élections Canada : Solde migratoire interrégional, Bas-Saint-Laurent, 2010-2011 à 2020-2021

Source : Institut de la statistique du Québec

Quant à Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine, la circonscription atteint même un taux d'accroissement de 14,8 pour l'année 2020-2021, toujours par rapport à 3,0 pour l'ensemble du Québec. La Gaspésie est du côté positif des échanges migratoires interrégionaux depuis cinq années consécutives.

« Les gains ont augmenté à tel point que, malgré l'accroissement naturel négatif, la population de la région a augmenté », explique la démographe de l'Institut de la statistique du Québec, Martine St-Amour, à La Presse 19 .

Solde migratoire interrégional, Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine, 2010-2011 à 2020-2021
Description de l'image fournie par Élections Canada : Solde migratoire interrégional, Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine, 2010-2011 à 2020-2021

Source : Institut de la statistique du Québec

Il est tôt pour déterminer l'impact durable de circonstances en évolution rapide et de décisions politiques sur l'avenir de ces régions. « Comme il y a une rupture de tendance avec le passé, il est difficile de ne pas faire de lien avec la pandémie », faisait valoir Mme St-Amour aux journaux de la Coop de l'information 20 .

En effet, il est plausible que l'accélération massive du recours au télétravail, dans ce qui semble en voie d'être une transformation permanente du monde du travail, a pu encourager un certain exode que l'on constate des grands centres vers plusieurs régions, dont le Bas-Saint-Laurent et la Gaspésie.

Il est aussi plausible que l'accès à Internet haute vitesse, dont les travaux de branchement ont été nettement accélérés à partir de l'entente Québec-Ottawa de mars 2021 et qui, de l'avis du gouvernement sortant du Québec, devraient être complétés ce mois-ci, puissent avoir un impact sur la décision des ménages de s'établir en régions éloignées.

Il est plausible que l'explosion des marchés immobiliers ait pu influencer des individus à quitter les centres urbains.

Il est plausible que l'annonce de 6,5 millions $ pour – enfin ! – assurer une couverture cellulaire le long des routes 132 et 195 pour 2023 s'ajoute favorablement à ce contexte pour les dix municipalités touchées dans la circonscription, mais aussi pour l'ensemble de la région 21 .

Dans tous les cas, il s'agit de circonstances extrêmement récentes dont l'impact à moyen et long terme ne saurait immédiatement être mesuré.

Le Bloc Québécois demande à la Commission d'annuler sa décision d'éliminer Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia à la lumière de ces changements extrêmement récents qui pourraient être porteurs d'avenir plutôt qu'abolir la circonscription sur la base des données démographiques du passé et priver l'Est-du-Québec d'une voix forte, d'une représentation essentielle et de services de proximité aux citoyens à un moment charnière pour la région.

Les MRC : un outil de développement régional à protéger

Diviser justement la carte électorale canadienne est certes une lourde tâche. C'est sans doute un casse-tête encore plus grand au Québec parce que s'ajoute à la formule habituelle une réalité typiquement québécoise : le respect des MRC.

Depuis 1979, le Québec municipal s'est rassemblé au sein de ces entités administratives afin de se donner collectivement davantage de poids politique et de coordination en matière de développement régional et d'aménagement du territoire, notamment. Diviser des MRC en plusieurs circonscriptions électorales ajoute des interlocuteurs et des embûches supplémentaires au développement régional. Par exemple, imaginons qu'un désaccord entre élus fédéraux de partis différents compromette un projet faisant l'unanimité au sein d'une MRC, pourtant un gouvernement de proximité reconnu en soi.

De nombreuses voix se sont déjà fait entendre localement, aux quatre coins du Québec, pour contester ce genre de division dans la proposition de refonte de la carte électorale. C'est entre autres publiquement le cas au Lac Saint-Jean, en Outaouais, au nord de Longueuil et plus encore.

Les élus du Bloc Québécois participeront aux différentes mobilisations locales et feront connaître au cas par cas à la Commission les contre-propositions qui émergent du terrain dans le cadre des audiences publiques.

Le Bloc Québécois s'y fera le partenaire des citoyens, élus et organismes locaux qui sont les mieux placés pour témoigner des dynamiques communautaires dans leur propre milieu de vie. Nous sommes persuadés que leur rencontre enrichira la Commission et permettra de parfaire ce complexe exercice de redécoupage de la carte électorale.

En conclusion

Le Bloc Québécois remercie la Commission de son attention et de son travail. Nous constatons bien qu'il s'agit d'un exercice important, mais aussi délicat. Nous sommes persuadés que la Commission est guidée par ses valeurs démocratiques et n'a aucunement l'intention d'affaiblir le rayonnement de l'Est-du-Québec et des régions en général.

C'est pourtant l'effet concret qu'aurait l'élimination d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia.

Cette décision priverait la région d'un ambassadeur ou d'une ambassadrice, en plus d'un législateur ou d'une législatrice. Elle entraînerait une diminution de services offerts à la population, aux élus locaux, aux organismes et aux entreprises, tant en ce qui concerne la qualité, la quantité et la proximité. L'élimination de la circonscription impliquerait également des pertes budgétaires importantes pour tous les événements locaux soutenus par le député ou la députée, pour les médias régionaux et plus encore. Elle met en péril le financement d'emplois d'été qui sont d'autant plus cruciaux dans une région cherchant à convaincre ses jeunes d'y rester.

Cette décision contredit tous les efforts investis tant localement que dans l'ensemble du Québec pour dynamiser et vitaliser les régions. Elle envoie un signal de déclin alors que le Québec entier tente de stimuler l'avenir de ses régions par tous les moyens. Mais surtout, l'élimination de la circonscription implique concrètement une perte de visibilité, de services et de budgets offerts à la région, ce qui pourrait carrément agir comme accélérateur d'un déclin contre lequel on se bat. Ça envoie comme message aux Québécois et aux Québécoises qu'ils auront droit à moins d'écoute et de représentation en politique, moins de services et moins d'argent s'ils choisissent la région d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia.

C'est pourtant l'une des plus magnifiques régions du Québec, au cœur de notre identité nationale. C'est une expérience typiquement – et uniquement – québécoise que celle de prendre la route l'été et s'émouvoir au fil du paysage qui se transforme en arrivant vers la porte de la Gaspésie. C'est longer la vallée de la Matapédia et ses rivières à saumon ; c'est la Baie-des-Chaleurs qui nous attend patiemment au bout. C'est la saison du crabe des neiges, du homard et de tous les produits de la mer qu'attendent impatiemment chaque année les gourmets du Québec entier.

Le Bloc Québécois ne choisira pas de favori entre les régions du Québec, mais parmi celles qu'il faut protéger et promouvoir, parmi celles auxquelles il faut tenir comme à la prunelle de ses yeux et non pas affaiblir, même un tant soit peu, n'y a-t-il pas cette région-ci ? C'est la question que le Bloc Québécois pose aujourd'hui à la Commission en l'invitant à maintenir la circonscription d'Avignon–La Mitis–Matane–Matapédia et la représentation des régions du Québec en général.

Notes de bas de page

1 Cour suprê me du Canada, renvoi : Circ.électorales provinciales (Sask.), (1991) 2 R.C.S. 158

2 Proposition de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales pour la province de Québec, p. 40 : https://redecoupage-redistribution-2022.ca/com/qc/prop/qc-prop_f.pdf

3 Idem, p.61

4 Idem, p.55

5 Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales, L.R.C. (1985) ch.E-3 : https://laws-lois.justice.gc.ca/fra/Lois/E-3/TexteComplet.html

6 Idem, art.15(2).

7 Proposition de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales pour la province de Québec, p.7 https://redecoupage-redistribution-2022.ca/com/qc/prop/qc-prop_f.pdf

8 Proposition de la Commission de délimitation des circonscriptions électorales fédérales pour la province de Terre-Neuve-et-Labrador, p.14 : https://redecoupage-redistribution-2022.ca/com/nl/prop/nl-prop_f.pdf

9 Idem.

10 Portrait économique des régions du Québec, Ministère de l'Économie et de l'Innovation du Québec, 2020, p.12 https://www.economie.gouv.qc.ca/fileadmin/contenu/documents_soutien/ regions/portraits_regionaux/20200322-PERQ-2020.pdf

11 https://www.tvanouvelles.ca/2022/08/12/nous-ne-laisserons-pas-la-voix-de-lest-du-quebec-saffaiblir-1

12 Diane Lebouthillier en entrevue à CFIM le 2 août dernier, https://cfim.ca/est-du-quebec-la-deputee-diane-lebouthillier-soppose-farouchement-au-redecoupage-electoral/

13 https://www.sainte-flavie.net/accueil.html

14 Cour suprême du Canada, renvoi : Circ.électorales provinciales (Sask.), (1991) 2 R.C.S. 158, p.26.

15 Élections Québec, La population bouge, la carte électorale change : la carte électorale du Québec 2011, rapport final, 2011, p.13. https://docs.electionsquebec.qc.ca/PRO/615f06a1120e1/DGE-6258-2012-VF.pdf

16 Loi électorale du Québec : https://www.legisquebec.gouv.qc.ca/fr/document/lc/e-3.3

17 Élections Québec, La population bouge, la carte électorale change : la carte électorale du Québec 2011, rapport final, 2011, p.13. https://docs.electionsquebec.qc.ca/PRO/615f06a1120e1/DGE-6258-2012-VF.pdf

18 https://statistique.quebec.ca/fr/fichier/fiches-demographiques-regions-administratives-quebec-2021.pdf

19 Démographie | La Gaspésie connaît une année record | La Presse

20 https://www.lesoleil.com/2022/01/13/exode-accru-des-grands-centres-vers-les-regions-20377240ee449f40faca3b7117bc1bf4

21 https://ici.radio-canada.ca/nouvelle/1905957/reseau-cellulaire-internet-gaspesie-telus-communication?fromApp=appInfoIos&partageApp= appInfoiOS&accesVia=partage&fbclid=IwAR1gIAeXapdQFENlzUdkd _78l_wzxu7dmfO7TBeakF3KFi5P6GqLDb5hqm4

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