Redécoupage des circonscriptions fédérales de 2022

Commentaire 31 (6 octobre 2022) commentaires et rétroaction

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Richard Gaétan

Objet : Demande de maintien du découpage électoral des Îles-de-la-Madeleine

Madame, Monsieur,

Le territoire de la municipalité des Îles-de-la-Madeleine est situé en plein cœur du golfe du Saint-Laurent, bordée par la Gaspésie et les quatre provinces maritimes. On y accède ou y sort uniquement par bateau ou par avion. Sa population de quelque 13 000 habitants y vit avec les quelques bienfaits et les nombreuses contraintes de l'éloignement et l'isolement.

En mai 2016, le gouvernement du Québec a adopté le décret no 354-2016 concernant la reconnaissance par le gouvernement du Québec du statut particulier lié au caractère insulaire et des contraintes structurelles de l'agglomération des Îles-de-la-Madeleine — maintenant la Communauté maritime des Îles-de-la-Madeleine — lors de la planification pluriannuelle effectuée dans le cadre de la Stratégie gouvernementale pour assurer l'occupation et la vitalité des territoires, que nous appelons communément le décret sur l'insularité.

L'objectif de cette reconnaissance est de positionner les résidents, les entreprises et les organisations de l'archipel à un niveau comparable à ceux des autres régions du Québec quant à leur capacité de prise en charge du milieu, de saisir les opportunités et d'assurer leur développement. En d'autres termes, le gouvernement du Québec exprimait sa volonté d'atténuer ou de compenser les contraintes additionnelles liées à l'éloignement, — bien sûr, mais surtout à l'isolement d'une communauté insulaire comme la nôtre —, contraintes qui nuisent notamment à l'attraction, à la rétention, à l'investissement, à la représentation, à la formation, etc., dans toutes les sphères de la vie.

Toujours au gouvernement du Québec, cette situation est aussi reconnue par la protection du comté des Îles-de-la-Madeleine à l'article 17 de la Loi électorale du Québec.

Ces éléments, la reconnaissance du statut particulier et la protection du comté, appuie le raisonnement démontrant l'importance pour une population d'être représenté par un élu représentatif, accessible et en mesure de soutenir la communauté dans son développement et d'y avoir accès dans une proximité et une facilité raisonnable.

Nous ne prétendons évidemment pas à la reconnaissance d'un comté électoral fédéral pour le territoire des Îles-de-la-Madeleine. Cependant, les mêmes principes de proximité, de représentation, d'accessibilité et de soutien demeurent fondamentaux. L'Est-du-Québec étant un territoire immense qui regroupe 16 MRC ou territoires équivalents, partagé en deux régions administratives et divisé par un bras de mer de 250 kilomètres, nous estimons que l'agrandissement du comté, tel que proposé, ne permettra pas de respecter ces principes et créera un déficit démocratique de représentation.

Notre territoire, comme la plupart des territoires de l'Est-du-Québec, vit une prospérité relative, mais fragile, après de longues périodes de difficultés économiques. Résiliente et entrepreneuse, elle demeure néanmoins fortement dépendante des décisions gouvernementales, que ce soit en termes financiers ou, tout aussi souvent, en termes réglementaires.

Dans ce contexte, l'accès au député pour les résidents, les entrepreneurs et les décideurs locaux est fondamental pour assurer le positionnement des enjeux locaux et régionaux dans le complexe agenda gouvernemental. Déjà, dans la situation actuelle, il est difficile pour le député de se rendre plus de 3 ou 4 fois par année sur le territoire des Îles-de-la-Madeleine. Un comté couvrant un territoire encore plus grand et des populations encore plus éloignées les unes des autres, tant géographiquement que par la nature de leurs besoins, ne peut qu'être considéré comme un recul démocratique. La fonction publique étant déjà très centralisée et urbaine, le rôle et la sensibilité des députés envers les enjeux de leurs commettants demeurent le principal outil pour assurer une compréhension des problématiques locales.

En plus des implications à l'intérieur du comté, la proposition d'abolir un comté dans la région provoque également une perte d'influence de notre région rurale et éloignée au bénéfice des régions urbaines et centrales. Dans le contexte contemporain des grands enjeux du réchauffement climatique et de vieillissement de la population, dans notre pays déjà très urbanisé, la diminution du nombre de députés dans la région risque malheureusement mener le gouvernement à errer dans ses politiques et ses interventions au détriment des régions rurales éloignées.

Nous comprenons que la Commission doive travailler dans un cadre défini par la Loi, laquelle vise à assurer une certaine égalité du nombre d'habitants par circonscription. Mais le critère démographique n'est pas le seul dont il faille tenir compte, surtout pas quand cela mène à la disparition d'une circonscription en région rurale et éloignée. En effet, la « Loi sur la révision des limites des circonscriptions électorales » précise que les commissaires doivent également considérer « les communautés d'intérêts ou la spécificité d'une circonscription » et le souci que leur superficie « dans les régions peu peuplées, rurales ou septentrionales de la province ne sont pas trop vaste ».

En résumé, comme représentants élus de la Communauté maritime des Îles, nous considérons que la proposition actuelle de redécoupage des districts électoraux :

  • provoque un recul démocratique et un déficit de représentation;
  • éloigne le député des citoyens de son comté;
  • diminue le poids des régions rurales au bénéfice des régions urbaines.

Nous vous demandons donc de sursoir à la présente proposition de redécoupage et de maintenir les comtés fédéraux actuels de l'Est-du-Québec et vous prions d'agréer, Madame, Monsieur, nos salutations distinguées.

(Original signé par)

Gaétan Richard, maire par intérim des Îles-de-la-Madeleine c. c. Mme Diane Lebouthillier, députée de la Gaspésie et des Îles-de-la-Madeleine et ministre du Revenu national M. Pablo Rodriguez, ministre du Patrimoine canadien et lieutenant du Québec

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