Redécoupage des circonscriptions fédérales de 2022

Conclusion

Comme l'indique le texte ci-dessous, la Commission a apporté un certain nombre de changements à sa proposition initiale. Pour expliquer la manière dont la Commission est parvenue à ces conclusions, il est utile de présenter d'abord sa méthode de travail. Nous commençons par les principes généraux qu'elle a adoptés (ou rejetés), puis nous passons aux décisions relatives aux limites des circonscriptions.

Le redécoupage n'est pas uniquement une question de chiffres

La Commission reconnaît que le point de vue exprimé par le public est valable dans la mesure où nous avons accordé une importance disproportionnée à la réduction de l'écart de population entre les 11 circonscriptions. À cet égard, la Commission tient à signaler que certaines commissions d'autres provinces ont estimé que l'écart entre les circonscriptions ne devait pas dépasser 10 %, voire moins. Certaines publications universitaires soutiennent également l'idée de réduire l'écart et d'abandonner la marge élevée de 25 %, prévue par la Loi. Bien que la Commission respecte ces points de vue, elle a conclu que cette approche ne doit pas être adoptée pour la Nouvelle-Écosse, notamment en raison de sa géographie et de l'évolution historique de son occupation.

Depuis l'arrivée des premiers Européens, les habitants de la province se sont principalement installés près du littoral et des sources d'eau intérieures. Par conséquent, la plupart des régions intérieures de la province sont peu peuplées. En raison de la situation géographique de la province et de l'évolution des modes d'établissement, il est impossible d'adopter une approche visant à atteindre une répartition quasi équivalente de la population entre les 11 circonscriptions. Comme l'a fait remarquer un participant, chercher à ce que toutes les circonscriptions aient un pourcentage d'écart prédéterminé reviendrait à faire passer un chameau par le chas d'une aiguille. Dans ses délibérations, la Commission était soucieuse de soupeser toutes les considérations prescrites par la loi et estime que son objectif premier n'est pas de réduire au minimum l'écart entre les circonscriptions.

Représentation effective

La Constitution prévoit le droit à une représentation effective pour chaque citoyenne et citoyen. Comme l'établit l'arrêt Carter, le droit de vote prévu par la Charte canadienne des droits et libertés ne prescrit pas une égalité absolue, mais une parité relative du pouvoir électoral. La Commission reconnaît que la représentation effective ne repose pas exclusivement sur le nombre de personnes que compte une circonscription.

Le rôle d'un député est de représenter efficacement ses électeurs. Cependant, sa façon de remplir cette mission et les défis que cela représente peuvent varier considérablement. La Commission a accueilli les observations de sept députés au Parlement, qui ont fourni des renseignements utiles non seulement au sujet de leur circonscription en particulier, mais aussi sur la façon dont ils exercent leurs responsabilités.

La Commission reconnaît que les députés des circonscriptions rurales rencontrent des défis différents de ceux de leurs homologues en milieu urbain. Étant donné que les circonscriptions rurales sont peu peuplées, elles tendent à être vastes et à recouvrir un terrain difficile. Certains services permettant aux électeurs de communiquer facilement avec les élus des régions urbaines (p. ex. connexion Internet fiable, réception cellulaire et transport en commun) n'existent tout simplement pas dans de nombreuses régions rurales de la province. Nous sommes conscients que cette situation présente des difficultés d'ordre pratique pour les députés d'une circonscription rurale. La Commission comprend que l'augmentation de la superficie d'une circonscription rurale en vue d'approcher le quotient électoral peut avoir des conséquences négatives sur la capacité d'un élu à bien servir les résidents de sa circonscription. Autrement dit, dans une circonscription rurale, un député peut avoir de la difficulté à représenter efficacement 70 000 personnes dispersées sur le plan géographique, alors que son collègue d'une circonscription urbaine peut facilement assurer une représentation efficace de 100 000 électeurs ou plus. Si la présente proposition est acceptée, les écarts démographiques plus importants entre les circonscriptions urbaines et rurales sont justifiés et conformes à l'objectif principal de la représentation effective.

Une cinquième circonscription urbaine

Les tenants de la création d'une cinquième circonscription dans la région de Halifax ont invoqué des raisons convaincantes fondées sur l'accroissement de la population de la municipalité régionale de Halifax. Près de 42 % de la population de la Nouvelle-Écosse réside dans cette zone urbaine; pourtant, la région de Halifax ne compte que 4 des 11 circonscriptions de la province. Selon ces personnes, l'ajout d'une cinquième circonscription est non seulement justifié, mais nécessaire si on applique avec précision les principes numériques régissant le redécoupage.

Les données sur la population sont suffisamment évidentes, et la Commission ne conteste pas le fait qu'une cinquième circonscription urbaine rapprocherait la population des circonscriptions du quotient électoral de la province (bien que les valeurs résultantes seraient plutôt faibles). Cependant, comme nous l'avons indiqué ci-dessus, parvenir à une parité relative du pouvoir électoral et assurer une représentation effective, ce n'est pas uniquement une question de chiffres. Dans les circonstances actuelles, nous ne constatons pas la nécessité de créer une cinquième circonscription dans la région de Halifax, ce qui se solderait par la disparition définitive d'une circonscription ailleurs dans la province.

Dans son rapport définitif, la Commission reconnaît que les quatre circonscriptions les plus urbanisées dépassent largement le quotient électoral de 88 126. Cependant, toutes les circonscriptions, aussi bien urbaines que rurales, se situent dans les limites de l'écart permis de 25 %. Nous sommes convaincus que la présence de quatre circonscriptions urbaines plus peuplées n'empêche pas leurs résidents de se faire représenter efficacement par leur député. Il faut rappeler par ailleurs nos réserves quant aux effets négatifs possibles de l'élargissement de la superficie des circonscriptions rurales. Nous sommes d'avis que, même si la population des quatre circonscriptions urbaines est plus élevée, le redécoupage prévu dans le présent rapport définitif ne compromettra pas la représentation effective de leurs résidents.

Décisions relatives aux limites des circonscriptions

Dès le début de ses délibérations, la Commission a pu cerner sans difficulté plusieurs modifications de circonscriptions précises qui seraient intégrées dans son rapport définitif. À partir des commentaires reçus, nous sommes parvenus aux conclusions suivantes :

  • Il ne faut pas diviser le corridor d'East Hants, comme nous l'avons proposé au départ. La Commission reconnaît qu'en raison d'une communauté d'intérêts, les résidents d'East Hants sont attachés au secteur et souhaitent fortement continuer de faire partie de la circonscription de Kings—Hants. Nous avons intégré ce changement dans la version définitive du redécoupage.
  • Preston, North Preston et East Preston devraient se trouver dans une circonscription rattachée à la municipalité régionale de Halifax. La Commission avait deux choix à cet égard. Elle pouvait intégrer ces communautés à Dartmouth—Cole Harbour ou les laisser rattachées au secteur de Fall River et de Sackville, comme c'est le cas depuis le redécoupage de 2012 (Sackville—Preston—Chezzetcook).
  • Le comté de Shelburne sera réintégré dans South Shore—St. Margarets. La Commission accepte l'opinion selon laquelle les résidents du secteur forment une communauté d'intérêts plus marquée avec les résidents de South Shore. La Commission a également été sensible aux préoccupations exprimées quant aux incidences que causerait l'ajout d'une population majoritairement anglophone à la représentation effective de la minorité linguistique acadienne qui faisait partie de la circonscription initialement proposée de Rive-Acadienne—Shelburne.
  • Le secteur de la Sambro Loop restera rattaché à la circonscription d'Halifax. La Commission reconnaît que la modification proposée séparait pratiquement le secteur du reste de la circonscription de South Shore—St. Margarets, facteur qui n'a pas suffisamment été pris en compte dans notre proposition.
  • Le secteur d'Eastern Passage ne devrait pas être séparé géographiquement du reste de la circonscription. Il restera donc dans Dartmouth—Cole Harbour, comme la Commission l'avait initialement proposé.

D'autres décisions étaient plus difficiles à prendre et ont exigé des discussions et une réflexion approfondie, notamment en ce qui concerne les limites des circonscriptions (ou de la circonscription) de l'île du Cap-Breton, l'emplacement du comté d'Antigonish et la composition de Dartmouth—Cole Harbour.

  • La suggestion d'une seule circonscription représentant l'ensemble de l'île du Cap-Breton a piqué la curiosité de la Commission. Nous avons évalué le chiffre de la population d'une unique circonscription recouvrant l'île. Cette solution n'est toutefois pas envisageable, puisque la population dépasserait largement l'écart permis de 25 %.
  • La Commission a examiné la possibilité de diviser l'île du Cap-Breton en deux circonscriptions sans devoir faire déborder l'une des circonscriptions sur la partie continentale. Là encore, nous avons effectué des calculs démographiques et constaté assez rapidement qu'il n'est pas possible de placer deux circonscriptions à l'intérieur de l'île, car les populations des deux entités se situeraient bien en deçà de l'écart permis de 25 %. Par conséquent, il faut rattacher une des circonscriptions de l'île à un secteur de la partie continentale (comme c'est le cas depuis le décret de représentation de 2003).
  • La Commission convient que l'île du Cap-Breton devrait être dotée d'une circonscription urbaine. Elle a passé beaucoup de temps à débattre des limites d'une telle circonscription. La nouvelle circonscription de Sydney—Glace Bay, qui comprend la région industrielle du Cap-Breton, est le fruit de ces discussions.
  • Malgré les commentaires du public voulant que la Commission évite de séparer les comtés de Pictou et d'Antigonish, nous avons décidé de regrouper l'ensemble du comté d'Antigonish, Guysborough et les régions rurales de l'île du Cap-Breton dans la circonscription nouvellement nommée de Cape Breton—Canso—Antigonish. Comme nous l'avons mentionné, la Commission a aussi reçu des commentaires en faveur de ce type de subdivision. Nous sommes convaincus que, même s'il existe un lien entre les résidents des comtés d'Antigonish et de Pictou, le même constat peut être fait dans la région du détroit de Canso.
  • La Commission a reçu de nombreux commentaires de la part du public souhaitant que Dartmouth—Cole Harbour conserve la configuration établie à la suite du redécoupage de 2012. Cependant, ce n'était tout simplement pas possible. Nous avons déjà expliqué pourquoi le secteur d'Eastern Passage fait partie de la circonscription d'un point de vue géographique. Certaines personnes ont indiqué qu'une communauté d'intérêts unit Preston, East Preston et North Preston à Cole Harbour et qu'en conséquence ces localités devraient faire partie de la circonscription. De plus, comme nous l'avons indiqué, la Commission a reçu de nombreuses plaintes concernant sa proposition de retrancher de la circonscription d'anciens quartiers de la ville de Dartmouth. Cependant, le maintien de tous ces secteurs dans la circonscription entraînerait un dépassement bien au-delà de l'écart permis de 25 %. La Commission a donc dû prendre des décisions difficiles, comme on peut le voir ci-dessous.
  • Bien que consciente des liens étroits qui unissent Preston, East Preston et North Preston à Cole Harbour, la Commission a déterminé que ces collectivités devaient demeurer dans une circonscription semblable à celle qui a résulté du redécoupage de 2012 (nouvellement nommée Sackville—Bedford—Preston).
  • Afin de respecter le plus possible les avis du public, la Commission a préparé différents scénarios de délimitation des quartiers de Dartmouth. Nous avons ajouté et retiré des secteurs des circonscriptions adjacentes en vue de trouver une solution. Dans sa décision définitive, la Commission a maintenu certains secteurs contestés (Burnside et une grande partie du chemin Windmill) à l'extérieur des limites de la circonscription de Dartmouth—Cole Harbour. Cependant, plusieurs quartiers ont été réintégrés à Dartmouth—Cole Harbour, conformément à la demande du public. Dans ses nouvelles limites, Dartmouth—Cole Harbour présente un écart de +18,95 % par rapport au quotient électoral, ce qui en fait la circonscription la plus peuplée de la province. La Commission éprouve une certaine réticence quant à cette issue. Toutefois, nous avons essayé de réduire cet écart en déplaçant une partie de la population dans des circonscriptions voisines, mais cela n'a fait que hausser l'écart de ces circonscriptions dans la même fourchette.

Au terme de nos délibérations et compte tenu des considérations mentionnées, la Commission a mis au point les limites et les noms des 11 circonscriptions de la Nouvelle-Écosse. Les descriptions officielles et les cartes de chaque circonscription figurent à la fin du présent rapport. Le tableau ci-dessous présente le nom des circonscriptions proposées, leur population ainsi que l'écart par rapport au quotient électoral (88 126).

Nom de la circonscription, Population, Écart
Nom de la circonscription Population Écart
Acadie—Annapolis 76 252 -13,47 %
Cape Breton—Canso—Antigonish 75 141 -14,73 %
Cumberland—Colchester 82 014 -6,94 %
Dartmouth—Cole Harbour 104 825 +18,95 %
Halifax 98 885 +12,21 %
Halifax-Ouest 99 228 +12,60 %
Kings—Hants 95 063 +7,87 %
Pictou—Eastern Shore 76 210 -13,52 %
Sackville—Bedford—Preston 100 416 +13,95 %
South Shore—St. Margarets 79 130 -10,21 %
Sydney—Glace Bay 82 219 -6,70 %