Redécoupage des circonscriptions fédérales de 2022

Partie II : Les principes

Le redécoupage des circonscriptions électorales est soumis aux principes énoncés à l'article 15 de la Loi :

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    1. Pour leur rapport, les commissions suivent les principes suivants :
      1. le partage de la province en circonscriptions électorales se fait de telle manière que le chiffre de la population de chacune des circonscriptions corresponde dans la mesure du possible au quotient résultant de la division du chiffre de la population de la province que donne le recensement par le nombre de sièges de député à pourvoir pour cette dernière d'après le calcul visé au paragraphe 14(1);
      2. sont à prendre en considération les éléments suivants dans la détermination de limites satisfaisantes pour les circonscriptions électorales :
        1. la communauté d'intérêts ou la spécificité d'une circonscription électorale d'une province ou son évolution historique,
        2. le souci de faire en sorte que la superficie des circonscriptions dans les régions peu peuplées, rurales ou septentrionales de la province ne soit pas trop vaste.
    2. Les commissions peuvent déroger au principe énoncé par l'alinéa (1)a) chaque fois que cela leur paraît souhaitable pour l'application des sous-alinéas (1)b)(i) et (ii). Le cas échéant, elles doivent toutefois veiller à ce que, sauf dans les circonstances qu'elles considèrent comme extraordinaires, l'écart entre la population de la circonscription électorale et le quotient mentionné à l'alinéa (1)a) n'excède pas vingt-cinq pour cent.

En ce qui a trait au chiffre de la population de chacune des circonscriptions électorales, celui-ci doit correspondre « dans la mesure du possible » au quotient résultant de la division du chiffre de la population de la province par le nombre de sièges de député à pourvoir (« le quotient électoral »). Il est possible de déroger à ce principe de parité lorsque cela « paraît souhaitable », auquel cas la Commission doit toutefois veiller à ce que, sauf « circonstances [qu'elle considère] comme extraordinaires », l'écart entre la population de la circonscription et le quotient électoral n'excède pas 25 %, en plus ou en moins.

En ce qui a trait aux limites des circonscriptions électorales, il faut prendre en considération, outre le quotient électoral, la communauté d'intérêts ou la spécificité de la circonscription ou son évolution historique; et enfin, avoir le souci de faire en sorte que la superficie des circonscriptions dans les régions peu peuplées, rurales ou septentrionales « ne soit pas trop vaste ».

Ces principes ont fait l'objet d'un examen minutieux par la Cour suprême du Canada, dans les arrêts Renvoi : Circ. électorales provinciales (Sask.), [1991] 2 RCS 158 et, plus récemment, Toronto (Cité) c. Ontario (Procureur général), 2021 CSC 34.

Le plus haut tribunal du pays y enseigne que l'exercice du pouvoir de fixer les limites des circonscriptions électorales est assujetti à l'article 3 de la Charte qui garantit à tout citoyen canadien le droit de vote. À la question cruciale de savoir s'il est permis de s'écarter de la règle « une personne, un vote » dans le cadre du redécoupage des circonscriptions électorales, la Cour suprême répond qu'il ne s'agit pas tant d'atteindre l'égalité absolue des citoyens ou des électeurs que, de façon plus générale, d'en assurer une représentation effective, c'est-à-dire ce droit pour tous les citoyens d'être représentés au Parlement et d'avoir accès à un député et à son aide.

La parité du pouvoir électoral est le facteur le plus important à prendre en compte pour assurer une représentation effective des électeurs. En effet, une dilution indue du vote d'un citoyen par rapport à celui d'un autre risque de résulter en une représentation inadéquate du premier. Son pouvoir législatif serait ainsi réduit, comme pourrait l'être également l'accès qu'il aura auprès de son député et à l'aide qu'il pourrait en obtenir. Ceci étant, la parité du pouvoir électoral n'est pas le seul facteur à prendre en compte pour que différents intérêts, groupes et communautés puissent être équitablement représentés à la Chambre des communes. D'autres facteurs, dont ceux mentionnés dans l'article 15 de la Loi et les arrêts de la Cour suprême (les caractéristiques géographiques d'une circonscription, ses limites historiques, les intérêts d'une collectivité donnée ou son histoire, la représentation des groupes minoritaires) peuvent justifier la Commission de déroger à la règle de « une personne, un vote » dans l'intérêt, pour reprendre les mots de la Cour suprême, d'une représentation effective de « la diversité de notre mosaïque sociale ».

Ces principes ont été au cœur de la réflexion de la Commission.